Macron s'est-il trompé sur les compétences réelles de son successeur à Bercy ?
Après les contre-performances de la première partie de l'année,
le gouvernement est contraint de réviser à la baisse ses prévisions de croissance pour 2018, sans se risquer à fixer de nouveaux objectifs, ni de pistes sur d'éventuelles économies budgétaires.
"Nous réviserons les prévisions de croissance pour 2018" qui étaient de 2%, a admis mardi le ministre des Finances, Bruno Le Maire, sur BFM TV/RMC, après la publication vendredi des chiffres "décevants" de l'INSEE, officine de Bercy, pour le second trimestre avec une hausse à un an d'à peine 0,2% qui a confirmé la décélération de l'économie française depuis le début de l'année.
Pire encore, le ministre s'est abstenu de donner de nouvelles prévisions de croissance. "Elle sera communiquée à la rentrée lors de la présentation du budget", a précisé son entourage, annonçant un ajustement politique.
"Le gouvernement n'avait pas le choix. Il était obligé de réviser à la baisse ses prévisions de croissance", a avoué Philippe Waechter, économiste chez Natixis AM, qui table sur une hausse de seulement 1,5% cette année, dans le meilleur des cas.
Christopher Dembik, responsable de la recherche économique chez Saxo Banque, ne manifeste guère plus d'optimisme, avec une prévision dans une fourchette de 1,6 à 1,7%, convaincu lui aussi que l'objectif gouvernemental est "beaucoup trop ambitieux, impossible à tenir".
La croissance robuste de 2,2% (2,3% en données corrigées des jours ouvrés) en 2017 n'a pas fait long feu
Largement supérieure aux attentes, car surfant sur une tendance européenne favorable et sur les espoirs nés dans l'entreprise de l'arrivée aux affaires d'un banquier, cette décélération sur la première partie de 2018 douche les volontaristes du secteur privé qui portent Macron.
Les "experts" donnent à croire que cette décélération serait essentiellement due à une consommation plombée par la hausse des prix du pétrole, qui rogne sur le pouvoir d'achat des Français, mais plus sûrement imputable à la hausse de la CSG et des taxes sur l'essence en début d'année, ont estimé les économistes.
L'exécutif mise sur deux leviers à venir : la première réduction de la taxe d'habitation, en vue de sa suppression d'ici 2022 pour 80% des Français, ainsi que la deuxième phase de suppression des cotisations salariales en octobre pourraient relancer la consommation, même si la baisse des cotisations arrivera tardivement pour donner une impulsion déterminante à la croissance en 2018 et si toutefois le pouvoir ne continue pas à se déconsidérer et à inquiéter par ses pratiques. .
Vers plus d'austérité imposée aux seuls "gens qui ne sont rien" ?
La nette accélération de l'inflation en juillet, avec une progression de 2,3% plus marquée que le mois précédent (+2% en juin), soutenue par la hausse des prix de l'énergie, du fait singulièrement des taxes, pourrait toutefois compliquer un peu plus l'objectif du gouvernement.
"Ce n'est pas bon. Il y aura un aspect perte de pouvoir d'achat", a souligné Ph. Waechter, qui s'interroge sur les capacités du gouvernement à tenir, dans ces conditions, son engagement avec Bruxelles de réduire cette année le déficit public à 2,3%.
"Que va faire le gouvernement pour parvenir à réduire le déficit public ? Des économies sur les dépenses une augmentation de la fiscalité ? En tout état de cause, cela aura des effets sur la demande à court terme et pourrait être pénalisant pour la croissance", a-t-il estimé.
Pour l'instant, le gouvernement, qui a établi son budget 2018 sur la base de 1,7% de croissance et n'a pas encore dévoilé ses intentions, cherche une issue.
Pour Ch. Dembik, les mesures pourraient se traduire pas des "coupes dans les budgets de certains ministères, voire une nouvelle baisse des dotations aux collectivités". "Les choix budgétaires seront certainement très compliqués", a-t-il prévenu. Et très rudes pour les Français...
En attendant, B. Le Maire appelle à poursuivre "la transformation de l'économie du pays"...
Rien ne doit nous détourner de nos efforts pour accélérer la croissance, commente-t-il, sans savoir où il va. Il ne faut surtout pas que l'on lâche le rythme des réformes", a théorisé l'ancien ministre de l'Agriculture, soulignant le risque au passage.
"La croissance et l'économie, c'est le temps long", a-t-il raconté, en guise d'excuse à ses piètres résultats sur un an, pour expliquer le coup de mou de la croissance sur la première partie de l'année, mais aussi la hausse du chômage au second trimestre. "Il faut tenir notre cap, être capables de poursuivre la transformation jusqu'au bout. C'est comme ça que nous aurons des résultats", a fantasmé le ministre de l'Economie.
Selon l'INSEE, l'"acquis de croissance" pour l'année en cours - c'est-à-dire le niveau que le PIB atteindrait si l'activité stagnait d'ici la fin de l'année - est de 1,3%. L'organisme public veut croire à 1,7% de croissance pour l'ensemble de l'année. La Banque de France, qui se doit d'être plus optimiste avec 1,8%, s'attend à une accélération marquée sur la deuxième partie de l'année.
Sinon, ce sera la faute à qui ?
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