Il n'y a rien à changer dans l'Education Nationale...
«Educativement incorrect»
«L'école n'a pas réussi à corriger les inégalités mais les a amplifiées.»
Le constat est sans appel. Il n'est pas dressé par quelque boutefeu, mais par quatre experts reconnus, membres du Haut Conseil de l'évaluation, placé sous la présidence de l'ancien directeur de cabinet de Jack Lang. A n'en pas douter, leur diagnostic fera date. C'est la première fois qu'on lit sous des plumes officielles une mise en cause aussi radicale du modèle égalitaire et «pédagogiste», qui, du plan Langevin-Wallon à la loi Jospin en passant par la loi Haby, inspire toutes les réformes de l'école depuis un demi-siècle.
Certes, les auteurs de ce rapport, qui doit servir de base au grand débat national voulu par Luc Ferry, avancent à pas comptés. Issus du sérail, ils s'efforcent d'en ménager les susceptibilités. Mais, derrière les précautions oratoires et les fleurs de rhétorique ministérielle, ils dressent un état des lieux sans fard, qui bouscule quasiment tous les dogmes de l'«éducativement correct».
Le niveau? Il n'est pas bon.
Les auteurs le reconnaissent prudemment, mais ils le reconnaissent: «Le nombre d'écoliers qui demeurent en difficulté de lecture ou de calcul à l'entrée du collège pose la question la plus grave.» Au passage, ils relèvent que les enfants font deux fois et demie plus de fautes d'orthographe que leurs grands-parents.
Les moyens budgétaires? Ils sont gigantesques
et en constante augmentation, sans que l'on puisse déceler – euphémisme pudique – de «corrélation systématique» entre cet effort de la nation et les résultats du système. Précision, qui ira droit au cœur des syndicats:
le temps de présence des professeurs du second degré devant les élèves «est un des plus faibles de l'Union européenne».
Quant à la lourdeur des classes, «elle n'est pas excessive». Au contraire, le taux moyen d'encadrement des enfants est remarquable: un adulte pour sept élèves. Résultat: le coût d'un élève du second degré est supérieur de près de 30 % à la moyenne de l'OCDE.
Longtemps tabou, le collège unique est épinglé: «L'extrême hétérogénéité des élèves de collège, écrivent les rapporteurs, conduit les professeurs à baisser leur niveau d'exigence.»
Le dogme du bac pour tous n'est pas non plus épargné. Certes l'économie a besoin de davantage de bacheliers, mais pas à n'importe quel prix: le nombre d'échecs en premier cycle universitaire, lit-on dans le rapport, «rend suspecte la valeur du titre».
Les experts du Haut Conseil n'avaient pas pour mission de donner des solutions.
Ils en esquissent pourtant quelques-unes.
Meilleure formation des maîtres,
évaluation des méthodes,
autonomie accrue des chefs d'établissement,
diversification des enseignements,
assouplissement du collège unique,
développement de la formation en alternance
prise en compte des besoins de l'économie.
Elles vont incontestablement dans le bon sens. A l'heure où l'opinion s'interroge sur les bienfaits de la mixité ou sur le retour de l'uniforme, c'est le signe que, de la base au sommet, les esprits évoluent. S'il est mené à son terme, le grand débat sur l'école pourrait bien produire des fruits inattendus. Alexis Brézet
C'était le 11 octobre ...2003 et le débat continue...
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