Guy Drut amnistié: et alors ?
En vertu des pouvoirs du Président de la République, J. Chirac a amnistié Guy Drut, condamné en octobre dernier dans l'affaire des marchés publics d'Ile-de-France. La justice lui reprochait d'avoir bénéficié d'un emploi fictif entre juin 1990 et février 1993 dans l'entreprise de bâtiment et travaux publics Sicra.
Guy Drut, champion olympique du 110 mètres haies en 1976, puis ministre des Sports de 1995 à 1997, a été condamné en octobre dernier à 15 mois de prison avec sursis et 50.000 euros d'amende.
Avant de prendre cette mesure d'amnistie individuelle "pour services rendus à la Nation", le chef de l'Etat avait veillé à ce que la condamnation pécuniaire ait été payée et vérifié que Guy Drut n'ait pas été condamné à une peine d'inéligibilité.
Jean-Louis Debré, président de l'Assemblée nationale, a déclaré que le Président s’est fait complètement embobiner par les représentants du monde sportif". Mais l'ancien ministre de l'Intérieur a aussi ajouté qu’il n’aurait pas eu le courage de le faire". Des députés de l’UMP manquent aussi cruellement de courage. Il faut rappeler en outre que Guy Drut est membre du Comité International Olympique où la France n’est pas sur-représentée et où elle aurait perdu 1/3 de ses membres.
Courageux, B. Delanoe, le maire socialiste de Paris, ne s’est pas exprimé sur le sujet, lui qui a été si convaincant dans la défense de la candidature de la capitale aux J.O.
Le PS a saisi de l’occasion pour crier à l’injustice qui est un thème porteur et rassembleur. (Très) Pauvre en propositions constructives, il a l’indignation facile mais la pédagogie défaillante malgré le nombre élevé d’enseignants dans ses rangs, car il n’explique pas aux Français qu’en démocratie les lois votées sont faites pour être appliquées. Or, "l'amnistie, c'est une loi votée par le Parlement et les députés qui la votent assument leurs responsabilités", a fait valoir J.L. Debré.
La presse ‘libre’ qui emboîte le pas au PS et ne s’embarrasse pas de détails, tronque évidemment les propos nuancés du président de l’Assemblée pour exploiter les termes d’ «erreur ravageuse », tout en escamotant son appréciation d’un « geste courageux ».
S'insurgeant donc contre un traitement médiatique en "deux poids, deux mesures", le parti socialiste oublie donc volontiers que José Bové (Vert trotskiste) ou le brillant député communiste Maxime Gremetz ont été graciés. "On a trouvé que c'était normal", a ironiquement souligné Jean-Louis Debré.
■ Le cas José Bové
En 2003, Jacques Chirac accorda deux mois de remise de peine au leader syndical José Bové ; ces deux mois s'ajoutant aux deux mois de remise de peine dont il bénéficera au titre de la grâce collective du 14 juillet. Conformément à l'article 17 de la Constitution, cette grâce présidentielle est une prérogative exclusive du président de la République qui n'a pas à la motiver.
José Bové a toujours affirmé qu'il n'était «pas question» pour lui de s'«agenouiller devant le président Chirac» pour demander une grâce, tout en faisant savoir qu'il ne s'«opposerait pas» à une «libération anticipée»…
■ Le cas Harlem Désir
Harlem Désir, député PS, fut condamné à 18 mois de prison avec sursis et 30 000 francs d'amende pour recel d'abus de biens sociaux de novembre 1986 à octobre 1987, alors qu'il était président de SOS Racisme!
Les supporters de SOS Racisme ont dû être déçus, choqués, voire ulcérés. Non, ils ont oublié, excusé…
Tous ceux qui savent et n’ont pas oublié qu’il a osé demander l’amnistie pour le camarade Bové n’en croient pas leurs oreilles!
■ Le cas des hurleurs
- Le grotesque Hollande illustre le sens moral du PS qui hurle à la ‘désinvolture’ : "Il faut en finir avec la pratique monarchique de la Ve République qui, dans le meilleur des cas, offre au chef de l'Etat la possibilité d'un pardon républicain pour des cas de détresse ou des situations humanitaires et, dans le pire, permet d'oublier une condamnation infamante touchant un ami politique".
Ses amis politiques, les agités Bové - Gremetz seraient-ils visés par le comique en chef du PS ?
- Le psycho-maniaque Arnaud Montebourg, député socialiste, accuse Jacques Chirac d'"organiser l'impunité de ses propres amis et de lui-même". "Privilèges judiciaires en série, protection de ses amis, pressions sur les juges, détournement de la loi comme celle de l'amnistie pour protéger des gens qui ont été condamnés". (Europe 1, vendredi 26 mai)
Où était-il quand la loi de 2002 sur l’amnistie était votée ?
Son clone, Vincent Peillon, député européen PS, est plus lyrique. "Quelle image pour la France!", a-t-il lancé, en affirmant que Guy Drut, ancien champion olympique, est "un citoyen comme les autres". (LCI, vendredi 26 mai).
Tous les Français sont des champions et les Bleus vont le prouver à la Coupe du Monde de foot, soyons-en assurés !
- Nous n’avons pas eu droit, à ma connaissance, à une pensée définitive de Marie-sEGOlène Royal. Espérons qu’elle n’est pas souffrante. Simplement en institut de beauté : ça pourrait prendre un moment pour lui donner des formes. Dégustons !
- Le malheureux Gilles Artigues, député UDF, proche de François Bayrou, indisponible pour cause de chevauchée réparatrice dans la campagne béarnaise: "Il suffit, en effet, d'être l'ami de l'Elysée pour voir s'effacer une condamnation qui était loin d'être minime sur des faits avérés".
Il parle plus vite qu’il ne pense : et si on tournait sa langue avant d’affirmer que Gremetz et Bové sont des amis du Président ? Il suffit d’être l’ami d’un ex-ministre de l’Education Nationale pour sortir des âneries.
-Le cas de syndicats de magistrats
Pour le Syndicat de la magistrature, en toute impartialité, l'amnistie accordée par Jacques Chirac à Guy Drut "montre encore une fois que le président de la République méprise la justice". Font-ils référence au ‘mépris de la justice’ concernant les Bové et Gremetz. "Nous sommes scandalisés. A l'heure où les institutions sont critiquées de toutes parts, Jacques Chirac contribue à leur affaiblissement" (Déclarations, vendredi 26 mai) Que dire de la demande de Harlem Désir en faveur de l’amnistie de Bové ?
Selon l’Union syndicale des magistrats, qui connaît ses dossiers : Il s'agit d'"un retour des privilèges". Lorsque l'amnistie "s'applique à des personnalités individuelles choisies, cette mesure s'apparente au retour des privilèges qui ont été abolis par la Révolution française". "Quelle image de la justice donne-t-on à ceux qui ont été condamnés après les manifestations anti-CPE ou les émeutes de banlieue ?" (Déclarations, vendredi 26 mai)
Nous avons affaire à des professionnels de la justice en flagrant délit d’injustice : il bénéficient de l’impunité de leurs propos et ne risque pas d’être poursuivis pour calomnie. Pourquoi se priver ? Un privilège que la Révolution française n’a pas aboli…
- Déclarations de ministres
Dominique de Villepin, Premier ministre:"Guy Drut est un grand champion. Les polémiques, il faut savoir les placer là où elles pourraient éventuellement mériter d'être placées (...) ou d'être écartées". "Je ne vois aucune raison de polémiquer autour d'un grand champion qui nous a fait vibrer par son engagement". (Déclaration, vendredi 26 mai)
Pascal Clément, Garde des Sceaux
La mesure d'amnistie de Guy Drut "a pris en compte les mérites sportifs exceptionnels" de l'ancien champion "dont la renommée internationale a concouru au rayonnement de la France dans le monde". La mesure d'exclusion du CIO "pourra ainsi lui permettre de reprendre sa place au sein de cet organisme afin d'y poursuivre son action dans l'intérêt du sport olympique et de la France". L'amnistie, décidée "sur proposition du Garde des Sceaux", est fondée sur "la loi du 6 août 2002, applicable aux 'personnes qui se sont distinguées d'une manière exceptionnelle dans les domaines humanitaire, culturel, sportif, scientifique ou économique'", rappelle Pascal Clément. Guy Drut "a payé l'amende à laquelle il avait été condamné". (Communiqué, vendredi 26 mai)
Ils ont dit "deux poids, deux mesures", mais savent-ils ce qu’ils disent, ou est-ce de la démagogie ? Comme chacun sait, les synapses des députés PS ne se connectent pas bien, si bien que la mémoire du PS est compartimentée et sa morale est à géométrie variable. Tout de même, à ce point, c’est une épidémie de la maladie d’Alzheimer. Il fallait leur stimuler les neurones, puisque les médias ne jouent pas non plus leur rôle. Epidémie, mais peut-être pandémie donc?
Ainsi la dictature de l’opinion publique par la presse se vérifie en permanence dans ce pays démocratique. Le prestige de l’écrit et de l’écran, qu’on le veuille ou non, est encore immense quoi qu’on puisse y entendre et y voir, depuis le parti pris du quotidien du soir Le Monde à la propagande en continu de France-Inter, en passant par les articles du Parisien, de Libération ou l’émission-tribune de Serge Moatti.
Il faudra aussi que, spécialement dans les 12 mois à venir, les Français(es) exercent davantage leur sens critique et expriment leur désaccord haut et fort avec le manque de respect de la gauche et de la presse démocratique à la française pour les électeurs.
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