mardi 16 août 2011

Basilique de Fourvière: les touristes perturbent le culte


Tourisme et dévotion peinent à cohabiter

Depuis l’Antiquité, la colline de Fourvière est un haut lieu de la Cité. Les Romains y construisent leur forum, lieu de la vie publique. Dès le haut Moyen-Age, le lieu devient un sanctuaire marial.


En tongs et décolleté, dans la basilique de Fourvière de Lyon

C'est l'heure de l'office, mais ce couple n'est pas venu accompagner son petit garçon pour la cérémonie de bénédiction des enfants du 15 août. « Ma femme est bouddhiste. Moi-même, je n’ai pas de religion. Mais mon fils voulait entrer pour voir… », explique le papa.
Mais pendant ce temps, sur les bancs de la basilique lyonnaise et dans le tumulte et le crépitement des flashes d'appareils photos, plus d’un millier de fidèles tente de se recueillir et d'entendre la prière consacrée à Marie.
Ils chantent et prient, sans que ça dérange les touristes...

La foule qui entre et sort de ce lieu de silence et de prière s’extasie bruyamment sous ses voûtes sonores et les groupes organisés rivalisent d'agitation intempestive. La plupart des visiteurs oublient - ou ignorent- quel respect ils doivent aux croyants, si ce n'est à Celui qu'ils viennent adorer et prier. Au nom de la laïcité républicaine, de la séparation de l'Eglise et de l'Etat et de la sécularisation des biens ecclésiastiques, certains font la visite du propriétaire et affichent ostensiblement leur mépris des locataires, des bigots idolâtres et des cathos réactionnaires, mais des citoyens, pourtant.

Le touriste n’a cure des messes et célébrations, des prières et du recueillement.
Monseigneur Jouham déplore que certaines intrusions posent problème. Tout habillé de blanc, une médaille ronde à l’effigie de Marie à son cou, le recteur de Fourvière vient de rappeler une jeune fille à la décence.

Epaules et jambes nues comme à la plage, elle porte un short et un tee-shirt clair décolleté à bretelles qui irritent le prêtre. Stupéfait, les strings et les jeans à taille très basse qui découvrent un bout de sillon fessier lui paraissent inconcevables dans la maison de Dieu. Et pourtant ! Les bikinis et les torses nus de baigneurs sont interdits au centre des villes, mais les campeurs doivent-ils être interdits d'accès à la culture ?, polémiquent les laïcs. Et encore, tous ne provoquent-ils pas en se perçant l'oreille d'un bijou en forme de croix qui balance comme la tête du chien sur la plage-arrière de la BM...
Devant le relâchement vestimentaire observé avec l’été et l’afflux de touristes, la ville de Perpignan a décidé d’interdire de se promener torse nu ou en maillot de bain dans ses rues.

Victime de la discrimination, le rebelle demande du respect
" Vous pourriez vous habiller un peu pour entrer dans une église," explique l'homme d'Eglise.
Mais il en a gros sur le coeur et appelle aussi à la réflexion. Dans sa revue de presse, le journaliste de France Info s'étonne que la semaine du 15 aût soit religieuse. "Et le prêtre n’en a pas fini avec ses reproches contre les touristes", commente-t-il. "Vous ne rentreriez pas comme ça dans une mosquée. En plus, vous avez une main de Fatma ! ». Acculturées par les éducateurs de l'Education nationale, ces personnes croient peut-être que le symbole qu'elles arborent, qui est censé protéger du mauvais œil, a peu à voir avec le logo de SOS Racisme, "Touche pas à mon pote".

Interrogative, la jeune fille venue d'une autre planète croyait sans doute visiter un supermarché et balbutie qu’elle ne parle pas français. « On a un peu de mal à préserver la dignité des lieux. J’ai visité des musées où on impose le silence. Ici, ils entrent comme à la Part-Dieu », note le prêtre, désabusé.

Également vice-président des recteurs de sanctuaires, il indique qu’il s’agit d’un sujet récurrent de discussion au sein de cette assemblée. « C’est un effort permanent pour les faire respecter ».

Qu'est-ce qu'une « tenue correcte », de nos jours ?

Selon la règle observée au Vatican, les épaules et les genoux découverts sont prohibés.
Mais ce seuil de l'indécence est largement dépassé. « Il y a des gens qui mangent, qui boivent. Des amoureux qui vont se bisouiller sur les bancs […]. Je sors chaque semaine des fumeurs, qui viennent avec leur chien », poursuit-il, dépité, avant de se diriger vers l’autel pour animer la bénédiction des enfants.

« La bénédiction, c’est important. Elle donne de la joie ». Ghislaine fait partie des catholiques qui sont venus faire bénir leur (s) enfant (s) par Monseigneur Batut, à l’occasion de la célébration de l’Assomption.

Cette Lyonnaise est accompagnée de Michèle, une autre pratiquante, dont la ferveur est aujourd'hui suspecte. « La bénédiction leur apporte la protection de la Vierge », explique la dame. Toutes timides dans leurs belles tenues, Chloé et Rachel disent qu’elles sont contentes. Elles ont une dizaine d’années et vont régulièrement au catéchisme.

« La religion est une source de vie, une respiration », poursuit Michèle. « Surtout par les temps qui courent », souligne Ghislaine. Au moment voulu, les deux fillettes s’avancent vers l’évêque auxiliaire qui trace le signe de la Croix sur leur front. « Avancez, n’ayez pas peur », encourage Monseigneur Jouham. Recueillis, mais impressionnés par la majesté des lieux et la solennité du moment, les gamins se succèdent dans le chœur de la basilique. Tous repartent avec une image pieuse représentant Marie. Hier, une quarantaine d’enfants ont ainsi reçu une bénédiction. Selon le recteur de la basilique, environ 3 000 personnes étaient venues le matin et on en attendait autant en fin de journée.

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