Le collectif Nos retraites accuse l'exécutif d'avoir aménagé les simulations de son étude d'impact
Macron a cherché à faire passer sa réforme pour plus avantageuse qu'elle n'est
Etude "truquée", cas types "faussés": le collectif de citoyens Nos retraites dénonce une "opération de communication" du gouvernement propre à "fausser le débat parlementaire".
Les commentaires du Conseil d'Etat qui a critiqué des projections financières "lacunaires" de l'étude d'impact dévoilée vendredi 24 janvier par le gouvernement ont donne du crédit à ce groupe, proche des organisations syndicales et associations (CGT, Attac, Les Economistes atterrés, la Fondation Copernic, Unef, FSU, Solidaires), une extrême gauche farouchement opposées à la réforme des retraites et a juste raison, selon les magistrats administratifs.
Leurs critiques sont aussi relayées sur Twitter par Michael Zemmour, maître de conférences en économie à l'université Paris-Panthéon-Sorbonne, chercheur au LIEPP de Sciences Po.
Que reproche le collectif au gouvernement dans une étude publiée le 24 janvier ?
D'avoir enjolivé ses cas types pour faire apparaître son projet de régime universel par points sous son plus beau jour. Il l'accuse d'avoir figé l'âge pivot à 65 ans dans ses exemples, ce qui revient à minorer le malus appliqué à ceux qui prennent leur retraite avant cet âge et fausse les comparaisons avec les pensions que produirait le système de retraites en vigueur pour les générations nées dans les années 1980 et 1990. Il a donc redressé les cas en appliquant des âges pivots plus tardifs, ce qui ferait ressortir de fortes pertes de pension pour ceux qui partiraient avant cet âge en dessous duquel est appliquée une décote de 5 % par an, notamment pour les femmes.
Un âge pivot qui augmente en fonction de l'espérance de vie.
Il est vrai que c'est l'hypothèse retenue par le gouvernement, alors que, dans son projet de loi, il est prévu que l'âge pivot (ou d'équilibre, c'est la même chose) augmente en fonction de l'espérance de vie. Un an de vie en plus serait consacré aux deux tiers à l'allongement de la carrière et pour un tiers à la retraite, selon une règle prévue par défaut.
Il faut toutefois noter que le conseil d'administration de la future caisse universelle, qui réunira les organisations patronales et syndicales, pourra décider, dans une certaine mesure, de l'évolution de l'âge pivot en dérogation à cette règle. Ou que l'espérance de vie pourrait ne pas augmenter autant que le prévoit l'Insee.
Par ailleurs, l'âge pivot a été fixé par hypothèse à 65 ans au démarrage du régime universel pour la génération de 1975, mais la "conférence de financement" pourrait en décider autrement, si elle trouve d'autres moyens d'équilibrer plus vite financièrement le régime (en puisant dans les réserves, par exemple).
Trouver l'équilibre financier
Mais il faut aussi souligner que le régime actuel est en déficit. En l'absence de la réforme d'Emmanuel Macron qui instaure un régime par points, il devra donc très probablement être corrigé, sauf à laisser filer le trou entre les recettes affectées aux retraites et les dépenses, ce qu'aucun syndicat réformiste ne considère comme acceptable à moyen et long terme.
Si le collectif peut à bon droit dénoncer que l'âge pivot soit figé dans les cas types retenus par le gouvernement, il faudrait aussi qu'il reconnaissaisse que le système actuel ne pourra pas tenir sans ajustement : soit par la baisse des pensions (dont le taux de remplacement par rapport au dernier salaire est déjà programmé pour baisser puisque les retraites sont indexées sur l'inflation et non pas sur les salaires), soit par la hausse des cotisations, soit par le recul de l'âge de départ. Système par points ou en annuités, il faudra bien faire quelque chose !
Un niveau de dépenses contesté
Pour qu'une comparaison ait du sens, il faut donc projeter un scénario un minimum réaliste de ce que donnerait le système actuel afin de le rapprocher de ce que donnerait le régime universel avec un âge pivot plus élevé : par exemple en allongeant la durée de cotisation à 43 ans au rythme prévu par la loi Touraine (votée sous François Hollande) au-delà de l'échéance fixée actuellement, à savoir 2035.
Dans le reste de son étude d'impact, le gouvernement a d'ailleurs fait ce choix, critiqué lui aussi. Pour tous les chiffres globaux liés à sa réforme (pourcentage de dépenses de retraites par rapport au PIB, etc.), il a décidé de comparer le régime universel par points avec ce qui se serait passé si les futurs gouvernants avaient décidé d'allonger la durée de cotisation dans le système actuel au rythme prévu par la loi Touraine de 2014, au-delà de 2035. Car toute comparaison avec le système actuel figé tel qu'aujourd'hui serait évidemment défavorable à la réforme de l'exécutif !
Michael Zemmour dénonce par ailleurs le fait que la réforme portée par le gouvernement fasse baisser la part de dépenses des retraites dans le PIB à 13,5 % en 2030, alors que, dans le système actuel, cette part serait de 13,8 %… Mais ce chiffre est essentiellement lié aux mesures de redressement programmées de 2022 à 2027 pour réduire le déficit de 12 milliards d'euros par an (sur 325 milliards d'euros de dépenses en 2018) projeté à l'horizon 2025 qui devront être décidées « au cours de la conférence des financements » qui démarre jeudi 30 janvier. Or elles pourront passer par un cocktail de mesures qui pourrait ne pas réduire autant les dépenses de retraites qu'un recul effectif de l'âge de départ.
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