samedi 15 juillet 2017

"L'Etat, c'est moi !" : Macron confond fermeté et autoritarisme

"Je suis votre chef": fermeté, autoritarisme ou aveu de faiblesse ?
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Macron 1er en majesté

"Je suis votre chef" ou "c'est le chef de l'Etat qui vous le dit", martèle à toute occasion le frêle trentenaire.

Macron se sent constamment contraint de rappeler son autorité publiquement. Ainsi, jeudi, aux armées mais aussi à tout le pays, Urbi et Orbi, de sa voix de prêcheur en chaire. 
Le penchant d'Emmanuel Macron à l'autoritarisme se précise à chaque apparition officielle, avec une appétence particulière pour la scène internationale. Il ne maîtrise d'ailleurs pas non plus son corollaire, la difficulté à gérer la contestation, selon des députés et analystes. Tous ces problèmes d'ego ont jailli dès les deux premier mois. Et il reste cinq années... 

Le faible louvoie pour dissimuler ses carences.
Après des reproches adressés à son chef d'état-major des Armées, le général à cinq étoiles, Pierre de Villiers, naturellement soucieux d'empêcher les coupes budgétaires annoncées par le premier ministre, le président Macron a promis aux militaires une hausse des crédits de Défense à compter de 2018. Le chef d'état-major des armées (Cema), le général Pierre de Villiers, qui était pourtant bel et bien dans son rôle en protestant devant une commission parlementaire à huis clos, puis devant la presse, faute d'être écouté, contre les restrictions budgétaires pour l'armée en 2017.

Président 'La République en marche' de la commission de la Défense de l'Assemblée et conseiller défense d'Emmanuel Macron pendant la campagne présidentielle, Jean-Jacques Bridey, "regrette" le "choix" d'imposer 850 millions d'euros d'économies au ministère de la Défense en 2017. "C'est un choix. Personnellement, je le regrette, surtout quand je vois l'explication qui a été donnée par Bercy, puisqu'on nous dit qu'il faut faire quatre et quelques milliards d'économies mais que dans le même temps, on ouvre 1,5 milliard d'ouverture de crédit pour la capitalisation d'Areva", a déclaré sur RFI J.-J. Bridey, ex-maire PS de Fresnes et directeur technique dans un laboratoire photographique, profession qui le prédisposait mal à cette fonction parlementaire. 
"Je regrette que ces propos soient parus dans la presse. C'était à huis clos; j'avais demandé à tous mes collègues de tenir la confidentialité de ces propos", a dit Jean-Jacques Bridey. Mais "je comprends le raisonnement du chef d'Etat-major qui est un excellent officier général, un excellent chef d'Etat-major, apprécié des armées et qui travaille en toute confiance avec le chef de l'Etat et le ministre", a-t-il ajouté. Présent jeudi soir à l'hôtel de Brienne, Jean-Jacques Bridey n'a pas perçu le discours présidentiel "comme un sermon vis-à-vis du chef d'Etat-major". "Quand il parle de pressions, c'est peut-être des pressions venant de Bercy". Des tensions seraient-elles déjà apparues avec Bruno Le Maire et Gérald Darmanin ? 
Mais le petit bonhomme leur a aussi fait la leçon à tous, leur déclarant  gravement qu'il n'est "pas digne d'étaler certains débats sur la place publique", au nom de leur devoir de réserve.

Macron promet la transparence en tout, mais cultive le secret. 

Les méthodes élyséennes de barbouzes sont encore méconnues. Mais on a néanmoins appris qu'une voiture aux vitres teintées a pris en charge le maire de Rouen pour le conduire à travers les sous-sols du QG de campagne du candidat Macron jusqu'à l'émissaire de l'Elysée qui lui a proposé Matignon.

Chez le président, l'obsession du huis clos commence à interpeller. 
En mai 2017, Emmanuel Macron a rassemblé ses équipes en séminaire à huis clos au Musée du Quai Branly. 
En juin, pour faire face au déferlement de député(e)s venu(e)s de nulle part dans le paysage politique - 91 % des députés REM sont des nouveaux, et parfois de très jeunes élus, à l'Assemblée, laquelle s'est renouvelée à 75 % - , Macron et Jean-Paul Delevoye, ex-président de la commission d'investiture, ont dû organiser une formation à la vie de l'Assemblée au cours un séminaire de rentrée ...à huis clos. Un "séminaire de cohésion" destiné à établir le fonctionnement du groupe majoritaire autour du déjà très controversé chef de groupe, Richard Ferrand, et sa relation avec le gouvernement: du formatage de députés godillots.

Cette consigne de silence s'ajoute à celle qu'Emmanuel Macron a formulée à ses ministres dès le début du quinquennat.
Chaque mercredi midi, à l'issue du Conseil des ministresles membres du gouvernement sortent désormais de l'Elysée, en se tenant à distance des journalistes, dociles comme des députés novices.

"Je suis contre le fait que les militaires parlent aux journalistes mais le Cema est légitime à répondre aux députés qui l'auditionnent, et à qui l'Etat doit rendre des comptes. Sinon, on peut supprimer la commission de la défense!", s'échauffe Jean-Christophe Lagarde (UDI), membre de la commission et "constructif". 

"Ca dénote une volonté d'autorité légitime mais il doit faire attention que ça ne devienne pas de l'autoritarisme. Depuis que son pouvoir se met en place, le mot d'ordre le plus courant c'est 'silence dans les rangs'. 
On le voit à l'Assemblée : les députés En Marche ont consigne de ne pas signer un amendement déposé par un autre parti et de ne pas parler à la presse. On voit un système qui se verrouille", s'inquiète J.-Ch. Lagarde.

Et le député de Seine-Saint-Denis de rappeler que "la force" de la campagne de E. Macron avait été de "créer un capacité d'adhésion, pas de soumission !".

Une 'chape de plomb' s'est abattue sur le monde politique

"Je crois que le président parlait de la tribune que le Cema a fait vendredi matin dans Le Figaro et qu'il parlait de cela", a nuancé député socialiste Luc Carvounas, également membre de la commission. "Mais tout le monde sait que cette présidence sera autoritaire". 

"La sortie du président face à des militaires heureux de venir défiler, ce n'était pas approprié. C'est étrange d'être obligé de répéter 'je suis votre chef'. C'est qu'il y a un sujet", veut croire cet ancien proche de Manuel Valls.

Le chef de l'Etat a annoncé un "spoil system", rappelle en outre l'élu du Val-de-Marne. 
Mis en place aux États-Unis, le 'système des dépouilles' est un principe selon lequel un nouveau gouvernement doit pouvoir compter sur la loyauté partisane des fonctionnaires et pouvoir substituer des fidèles à ceux qui sont en place. En France, il est vise aussi à changer les hauts fonctionnaires aux postes-clés pour s'assurer de disposer de personnalités dévouées. "Tout cela ne crée pas un bonne ambiance", met en garde M. Carvounas.

Craignant qu'une "chape de plomb" tombe sur la classe politique, L. Carvounas, désormais proche de Benoît Hamon, rend ainsi hommage à Jean-Jacques Bridey (REM), qui a publiquement expliqué vendredi matin qu'il "regrette" le montant des économies réclamées aux armées.

L'expert en communication personnelle des dirigeants (dont le président du Conseil Représentatif des Associations Noires de France, CRAN, ou ceux d' Ogilvy, d'IBM, Nestlé, la BPCE ou encore l’AFII) et ancien journaliste (Le Monde, La Tribune, L’Express) et réalisateur (TF1, France 5, ARTE), Philippe Moreau-Chevrolet voit lui aussi une faille dans la mise au point de Macron, que son proche entourage appelait déjà "le chef", même avant son élection. "Dire 'je suis votre chef' à l'armée de son pays un jour de défilé militaire du 14 juillet est un acte fort. Mais cela montre aussi une faiblesse, car normalement les images suffisent", décrypte ce chargé de cours en communication personnelle et stratégie d’influence à l’Institut Mines Telecom.

Le chef de l'Etat a "du mal à gérer la contestation", ajoute ce co-fondateur et dirigeant de MCBG Conseil qui est actuellement Chroniqueur associé au Nouvel Observateur Le Plus.
"L'interview traditionnelle du 14 juillet aurait permis de décrisper la situation en répondant aux questions des journalistes, en rassurant et en amorçant un dialogue. [Macron 1er l'a d'abord supprimée, avant de la rétablir sous une forme allégée] Au lieu de cela, on a une communication officielle, froide, sans aucun espace pour le dialogue, où ne peut jouer que l'affrontement", fait-il valoir. 

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