Des messages précédemment supprimés plongent l'Elysée dans l'embarras
Des échanges entre l'ex-chargé de mission et l'Elysée portent sur l'épisode de violences à la Contrescarpe, le 1er Mai à Paris.
Un téléphone "perdu" toujours actif.
Le 21 juillet 2018, Benalla affirmait en garde à vue qu'il avait "perdu" son téléphone et qu'il ne souhaitait "pas donner d'éléments sur ce téléphone". Les données de ce portable personnel auraient été conservées "sur une clé USB", avait-il précisé le 5 octobre 2018, mais il lui fallait encore remettre la main sur elle dans ses affaires.
Le 19 février 2019, il avait finalement raconté que la clé USB "s'était perdue dans des déménagements successifs". Les enquêteurs sont parvenus à mettre la main sur le téléphone et on découvert qu'il était toujours actif alors qu'il était censé être "perdu".
En effet, le 22 juillet 2018 à 22h01, près de trois mois après les violences, Benalla est entré en correspondance, via ce même appareil, avec le chef de cabinet de Brigitte Macron, Pierre-Olivier Costa.
Le 19 février 2019, il avait finalement raconté que la clé USB "s'était perdue dans des déménagements successifs". Les enquêteurs sont parvenus à mettre la main sur le téléphone et on découvert qu'il était toujours actif alors qu'il était censé être "perdu".
En effet, le 22 juillet 2018 à 22h01, près de trois mois après les violences, Benalla est entré en correspondance, via ce même appareil, avec le chef de cabinet de Brigitte Macron, Pierre-Olivier Costa.
Ainsi, en mettant la main sur le téléphone déclaré perdu de Benalla, les enquêteurs ont mis au jour d'anciens messages supprimés d'Alexandre Benalla.
"Monsieur le Président, hier après-midi j’ai été invité par la Préfecture de Police à observer de l’intérieur la manifestation du 1er Mai; j’ai donc été équipé d’un casque et intégré à une équipe de policiers en civil et accompagné par un major de police. En fin d’après-midi, nous nous sommes retrouvés place de la Contrescarpe, où la situation a plus que dégénéré. Je ne me suis alors pas cantonné à mon rôle d’observateur (…) La scène assez violente a été filmée et même si on ne m’identifie pas très nettement je suis reconnaissable. Cette vidéo tourne actuellement sur les réseaux sociaux. Alexandre."
Ce message, révélé par Le Monde, Alexandre Benalla l'aurait envoyé directement à Emmanuel Macron quelques heures après l'incident, dans la nuit du 1er au 2 mai 2018. Le lendemain matin, il l'a transféré à Alexis Kohler, secrétaire général de l'Elysée.
Benalla a reçu des messages de soutien.
D'autres messages récupérés après effacement en disent long sur le climat délétère à l'Elysée. des mots de soutien à Alexandre Benalla. "Tous des cons Alexandre sois zen et fort c’est le patron qui décide et à 30 000 kilomètres (Emmanuel Macron se trouvait alors en voyage officiel en Australie) il ne décide rien te concernant", écrivait Jean-Luc Minet, le commandant militaire en second de la présidence de la République, un chef d'escadron, le 1er mai. "Merci pour ton soutien", avait répondu le chargé de mission, avant d’effacer soigneusement cet échange.
Rappelons une information d'août dernier révélant que l'homme de confiance de Macron s'est rendu à la PJ à bord d'un véhicule de l'Elysée. Huit jours plus tard, le jeune garde du corps de 26 ans a tenté de le récupérer à la fourrière, mandaté par... l'Elysée.
Le 20 juillet, deux jours après les révélations du Monde sur l'affaire Benalla, le jour même de sa mise à pied par l'Elysée, l'ex-chargé de mission était encore au volant d'un véhicule de la flotte présidentielle. La Renault Talisman, immatriculée EY-196-VZ, gérée par le commandement militaire du palais de l'Elysée, dirigé par le général Eric Bio-Farina, était garée sur le trottoir d'une rue adjacente au Tribunal de Grande instance, où l'ex-chargé de la sécurité présidentielle devait répondre à une convocation de la PJ dans ses nouveaux locaux du 17e arrondissement de Paris dans le quartier des Batignolles.
C'est donc à bord de ce véhicule de l'Elysée que le chargé de mission auprès du sous-préfet François-Xavier Lauch, chef de cabinet de la présidence, a déféré à sa convocation. Mais le jeune homme qui se croit tout permis n'a décidément pas de chance : après 36 heures de garde à vue suivie de sa mise en examen, il ne retrouve pas la voiture garée en stationnement gênant : malgré son gyrophare deux tons et son pare-soleil estampillé 'police', le véhicule a été embarqué à la fourrière Chevaleret, dans le sud de la capitale.
Une procuration du commandement militaire de l'Elysée.
Huit jours et près de 500 euros de frais d'amende et de garde plus tard, c'est Alexandre Benalla en personne qui s'est présenté pour retirer la Renault présidentielle. Contrairement aux dénégations très vigoureuses alors émises par les cow-boys de l'Elysée, il était bien mandaté par le commandement militaire du palais présidentiel, qui n'a rien à refuser au protégé du patron. Sur ordre du général Bio-Farina, c'est le commandant militaire en second de la présidence de la République, Jean-Luc Minet, qui a fait parvenir une procuration avec sa pièce d'identité pour que Benalla, pourtant mis à pied depuis huit jours, remplisse cette mission.
Alerté de la présence de Benalla à la fourrière, le magistrat instructeur avait aussitôt saisi la police judiciaire. Ce qui a permis aux enquêteurs du Quai des Orfèvres de perquisitionner la voiture officielle.
L'Elysée et Alexandre Benalla ont violé les règles du contrôle judiciaire
En dépit de la réglementation qui interdit au bodyguard du président d'exercer une mission de service public, le juge de la liberté et de la détention n'a pas été saisi. Interrogé, le Parquet de Paris ne voit aucun problème dans le fait que le commandement militaire chargé de la sécurité du Palais de l'Elysée passe par Benalla pour récupérer un véhicule officiel. Le ministère ne croit pas davantage que les gendarmes de l'Elysée aient voulu soustraire le véhicule à la curiosité de la police judiciaire.
Ce n'est pas l'avis des protagonistes de ce dossier d'instruction : "Etre missionné par le commandement militaire de l'Elysée peut s'apparenter à une mission de service public, argumente le procureur. Le juge de la liberté et de la détention aurait dû être saisi. Pas pour qu'Alexandre Benalla aille en prison [ce qui est prévu en cas de non-respect du contrôle judiciaire], mais pour démontrer que la justice traite tous les mis en cause à égalité."
Ce n'est pas la première fois que l'Elysée reste à la manœuvre pour assister son ex-chargé de mission, pourtant mis à pied depuis le 20 juillet.
De même, l'organisation de son entretien avec Le Monde pouvait laisser songeur. C'est Michèle Marchand, chargée de l'image du couple présidentiel, qui a présenté Marc Francelet au chargé de mission du chef de cabinet du président de la République.
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