Premier coup de pelle avec Jean-Claude Mailly de FO
Les questions soulevées
En annonçant une remise à plat du système fiscal français dans les colonnes des Echos, Jean-Marc Ayrault a relancé le vieux débat de la fusion de l’impôt sur le revenu et de la CSG (contribution sociale généralisée).
Or, c'est alors que la grogne dans l'opinion publique se focalise sur les hausses des impôts (écotaxe, TVA...), Jean-Marc Ayrault a ouvert, ce lundi matin, le chantier de la réforme du système fiscal promis pour le début de mandat par François Hollande lors de la campagne présidentielle.
Que cherche l'apprenti-sorcier Ayrault ? C'est en effet au moment où le couple présidentiel est au plus bas historique dans les sondages que le locataire de Matignon prend l'initiative, ce qui fait dire que, pour conserver son poste menacé de Premier ministre il n'a rien trouvé de mieux que d'ouvrir un chantier qui lie son sort, pense-t-il, à l'aboutissement de cette réforme au long cours. Si bien que le président Hollande prenant peur à ce qui fut pour lui aussi une surprise du chef du gouvenement, précisa bien que ce serait une oeuvre quinquennale. Si on évacue un instant l'intention politicienne de Ayrault, les questions qu'elle soulève donnent un faible aperçu de l'ampleur de la tâche.
La fusion de l'impôt sur le revenu et de la contribution sociale généralisée (CSG) est-elle une fausse bonne idée?
Faut-il baisser la pression fiscale des entreprises avec une augmentation progressive de la TVA ? Faut-il redéfinir l'impôt sur le revenu en le rendant plus progressif ? Faut-il faire le ménages dans les niches fiscales ? Quels sont les inconvénients d'un prélèvement à la source des impôts comme les ont expérimentés d'autres pays européens ? Faut-il repenser la fiscalité locale alors que le calcul de la taxe d'habitation et la taxe foncière repose sur des règles datant de 1970 ?
Le Premier ministre promet "des règles plus justes, plus efficaces et plus lisibles" en matière d'impôts, mais ambitionne aussi de parler tout à la fois du "financement de la protection sociale, de la dépense publique, d'investissements, d'emploi, de formation professionnelle, de pouvoir d'achat". Le tout à "prélèvements obligatoires constants sans hausses d'impôts", a-t-il promis.
Première invitée à Matignon ce lundi, Force ouvrière
Or, Jean-Claude Mailly, le secrétaire général de FO, s'est déclaré opposé à un prélèvement à la source de l'impôt sur le revenu. "Nous ne souhaitons pas que l'employeur ait connaissance de la situation fiscale du salarié", a expliqué le dirigeant syndical, évoquant la possibilité existante de mensualisation pour ceux qui le souhaitent.
Il a ajouté que, parmi les propositions qu'il va soumettre à Jean-Marc Ayrault, figure la place insuffisante à ses yeux de l'impôt sur le revenu, impôt progressif, dans le système fiscal.
Pour lui, le Premier ministre est "sincère" quand il exprime sa volonté de remettre à plat le système fiscal. "Quand le Premier ministre a annoncé qu'il était pour une remise à plat fiscale, j'ai dit banco tout de suite", a-t-il souligné. Mais Jean-Claude Mailly estime toutefois que le gouvernement a laissé passé le moment n'est plus opportun depuis qu'il a créé en France un "malaise fiscal", un profond "ras-le-bol fiscal".
Premières mesures à la hussarde
Si François Hollande a précisé que la réforme fiscale, dans sa totalité, prendrait "le temps nécessaire, c'est-à-dire le temps du quinquennat", les premières mesures devraient être prises dès l'été 2014 pour une "première étape traçant des perspectives". C'est à l'automne, lors des discussions sur le budget 2015, que ces mesures pourraient être adoptées.
Dans un premier temps, le Premier ministre reçoit les premiers leaders syndicaux tout au long de la journée. Dans l'ordre : FO, la CFDT, la CFE-CGC, la CGT, la CFTC puis le patronat (UPA,MEDEF) dans l'après-midi.
Le grand absent de ce premier tour de table est le ministre de l'Economie. Informé tardivement sur une réforme qui le concerne pourtant au premier chef, Pierre Moscovici est en déplacement en Chine. Alors que certains voient une reprise en main de Bercy par Matignon, Pierre Moscovici a assuré dimanche être "totalement en phase avec le Premier ministre" et a affirmé que "Bercy prendra toute sa place dans la réforme fiscale."
La seconde partie de la semaine sera consacrée à la réception des groupes politiques, ce qui permettra au gouvernement de fixer ensuite le calendrier à venir de la réforme.
Inquiétude des Français
La première piste à explorer est la fusion de l'impôts sur le revenu et la CSG, quatorzième des promesses de campagne de François Hollande. Actuellement, seul l'impôt sur le revenu est progressif, donc jugé fiscalement plus juste. La fusion IR-CSG permettrait de créer un grand impôt progressif. Aujourd'hui, la CSG est au même pourcentage quels que soient les salaires (7,5%), de 6,2% pour les allocations chômage, 6,6% pour les retraites... De fait, en proportion, la CSG pèse plus sur les bas revenus. Les syndicats y sont opposés. Les classes moyennes, celles qui souffrent déjà le plus de l'impôt sur le revenu, sentent à nouveau le froid de la lame sur leurs cous...
En outre, la fusion IR-CSG engage une réforme de l'État et de la Sécurité sociale. Le prélèvement à la source est un préalable. Une seule administration traiterait le nouvel impôt, au lieu de deux. Le rapport Migaud de 2007 préconisait de confier la gestion aux Urssaf, Bercy est-elle prête à laisser échapper l'une de ses fonctions historiques?
Par ailleurs, la fusion obligerait le gouvernement à engager un grand ménage dans tous les abattements, exonérations et déductions dont bénéficie l'impôt sur le revenu, à la différence de la CSG. Les Français qui sont contribuables réalisent qu'ils pourraient fort y laisser leurs dernières plumes.
En son temps, Jérome Cahuzac, ministre du Budget, avait informé l'Elysée qu'il valait mieux jeter l'éponge en raison de la complexité de la réforme à mettre en oeuvre.
La CFDT et la CFTC sont réservés, mais ...pas fermés: le danger vient aussi de ce côté...
Cette réforme provoque des inqiuiétudes légitimes chez les contribuables.
Selon un sondage IFOP (auprès de 1 015 personnes interrogés entre la 22 et 23 novembre) dans le Figaro de dimanche, la moitié des Français redoute que la réforme fiscale ne débouche sur des hausses d'impôts.
Alors que les Français ne sont pas informés des conséquences, cette enquête fait ressortir que 54% des personnes interrogées seraient encore favorables à la fusion de l'impôt sur le revenu et de la CSG (contribution sociale généralisée) et que 55% approuveraient la proposition d'un prélèvement à la source.
Mais, l'ouverture des consultations lance le débat et les Français vont être informés des menaces réelles que le pouvoir socialo-écolo fait peser sur eux.
Seulement 32% des personnes interrogées pensent déjà que le Premier ministre pourra mener à bien sa réforme.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Vous pouvez ENTRER un COMMENTAIRE (il sera modéré):