dimanche 13 février 2011

Départ de Ben Ali et arrivée de Tunisiens en Europe

Face à l'exode, l'Italie en appelle à l'aide internationale

La Tunisie se tourne vers l'avenir


Avec le départ le 14 janvier 2011 du désormais ex-président Ben Ali qui s'est réfugié à Jeddah en Arabie saoudite, les consultations sur les réformes politiques à mener en Tunisie ont démarré le samedi 15 janvier 2011.
C'est finalement Fouad Mebazaa, le président du parlement depuis 1997, âgé de 76 ans, qui assure la présidence par intérim, avec pour mission d'organiser une élection présidentielle dans les 60 jours. il est président de la chambre des députés .
Les nouveaux dirigeants tentent de reprendre le contrôle de la situation et les habitants essaient de s'organiser en comité de défense pour éviter les pillages. « Tous les Tunisiens sans exception et sans exclusive seront associés au processus politique », déclare Fouad Mebazaa.

Les réactions

En France, plusieurs milliers de manifestants, essentiellement des Tunisiens, des Franco-Tunisiens, ainsi que des représentants des partis de gauche français, se sont rassemblés place de la République à Paris, mais aussi à Marseille ou Nice, pour laisser éclater leur joie.
Désirdavenir Royal juge «important» que le Parti socialiste «puisse se constituer en force d'observation» dans l'organisation d'élections libres en Tunisie, proposant sa propre présence comme «garantie». Elle propose au peuple tunisien «une mise à disposition du Parti socialiste, des militants socialistes, des militants de gauche qui sont là, qui sont imprégnés des mêmes valeurs démocratiques». Le premier secrétaire du Parti socialiste, Martine Aubry, s'adresse quant à elle au gouvernement français: «la diplomatie française doit s'engager sans ambiguïté en faveur de la démocratie en Tunisie, à laquelle le peuple tunisien a montré qu'il aspirait avec force». Sur RTL, la vice-présidente du MoDem, Marielle de Sarnez, s'est empressée d'assurer que, dans la crise tunisienne, «la France n'a pas été à ce rendez-vous démocratique, ni hier ni les jours passés».

La France a apporté «un soutien déterminé» au peuple tunisien dans «sa volonté de démocratie», et «appelle à l'apaisement et à la fin des violences», ainsi qu'à «des élections libres dans les meilleurs délais», a déclaré Nicolas Sarkozy par communiqué. «La politique de la France est fondée sur deux principes constants: la non ingérence dans les affaires intérieures d'un Etat souverain, le soutien à la démocratie et à la liberté». La France a pris «les dispositions nécessaires pour que les mouvements financiers suspects concernant des avoirs tunisiens en France soient bloqués administrativement, conformément à la législation». A l'issue d'une réunion interministérielle à l'Elysée, la France a appelé «à l'apaisement et à la fin des violences» en Tunisie.

Le président américain Barack Hussein Obama salue le «courage et la dignité» du peuple tunisien, après la fuite du président Ben Ali, et appelle le gouvernement à organiser des élections «libres et justes» dans «un proche avenir», selon un communiqué de la Maison Blanche.

La Ligue arabe a incité toutes les forces politiques tunisiennes à être «unies».

L'Egypte «respecte les choix» du peuple tunisien.
La Russie souhaite la fin des des violences et un dialogue démocratique «dans le cadre constitutionnel» en Tunisie.

Le Soudan a salué la chute de Ben Ali, considérant ce «choix du peuple» comme une occasion d'atteindre «la liberté et la prospérité» pour la Tunisie.
L'Autorité palestinienne, proche du régime de Ben Ali, veut maintenir «les meilleures relations» avec la Tunisie et a démenti un communiqué de son parti l'OLP. L'Organisation de libération de la Palestine avait installé ses bureaux en Tunisie de 1982 à 1991, avant l'établissement de l'Autorité palestinienne en 1994.
Les partis palestiniens Hamas et Jihad islamique saluent la chute du président Zine El Abidine Ben Ali. Ce dernier n'était pas populaire auprès des islamistes compte tenu de la répression qu'il avait menée contre eux dans son pays. L'OLP a rendu hommage «au courage sans précédent du peuple tunisien et au sacrifice héroïque consenti pour réaliser ses aspirations».

En revanche, le président libyen Mouammar Kadhafi a regretté la chute de Zine El Abidine Ben Ali qui reste pour lui «toujours le président légal» de la Tunisie. Il a proposé aux Tunisiens l'application de son modèle de démocratie directe.


A la mi-janvier, 333 Turcs avaient déjà été rapatriés de Tunisie par un vol spécial. Ils font partie de la communauté turque en Tunisie, forte d'un millier de personnes.

Après le départ de Ben Ali, l'avenir, c'est l'Europe

Le gouvernement de transition se trouve désormais confronté à la démission de son ministre des Affaires étrangères et à un exode massif de clandestins tunisiens vers l'Europe.

L'Italie doit faire face
arrivée massive de clandestins tunisiens sur la petite île italienne de Lampedusa, à 138 km des côtes tunisiennes, vient cruellement rappeler au gouvernement l'ampleur de la réponse à apporter à la détresse de nombreux habitants au chômage, un mois après la chute du régime, le 14 janvier, du président Zine El Abidine Ben Ali.

La Tunisie a vivement réagi dimanche soir au souhait de l'Italie d'envoyer des policiers dans ses eaux territoriales pour empêcher l'afflux massif de clandestins sur l'île de Lampedusa. «Le peuple tunisien refuse le déploiement de soldats étrangers sur son territoire», a lancé Taïeb Baccouche, le porte-parole du gouvernement tunisien, sur Al-Arabiya. «C'est inacceptable !».
Sur une chaîne italienne, le ministre italien de l'Intérieur Roberto Maroni avait annoncé qu'il allait en faire la demande auprès de Tunis. Ce qui n'est guère surprenant dès lors que cette requête «émane d'un ministre appartenant à l'extrême droite raciste», a commenté Taïeb Baccouche.

En cinq jours, plus de 5 000 Tunisiens clandestins ont débarqué à Lampedusa, dont 1 400 depuis samedi minuit. Rome a lancé un appel à l'aide internationale pour affronter la crise et avançait le projet d'envoyer ses policiers au large de la Tunisie, comme elle l'avait fait dans les années 90 pour endiguer un afflux de ressortissants albanais.

Reste à présent la solution européenne.
Roberto Maroni, membre du parti anti-immigrés et populiste de la Ligue du Nord, déplore l'absence d'une action européenne concertée, déclarant que l'UE «a laissé l'Italie seule, comme d'habitude».

Il faut «une réponse immédiate de l'UE à la nouvelle situation, l'Italie ne peut pas faire front seule et il est de l'intérêt de l'Europe entière (d'agir) de manière efficace et en temps voulu», ont insisté le ministre de l'Intérieur soutenu par le ministre des Affaires étrangères Franco Frattini. Ce dernier doit se rendre à Tunis ce lundi et s'entretenir avec le Premier ministre tunisien Mohammed Ghannouchi.

L'Union européenne n'a pas anticipé

Les partis de gauche français qui ont applaudi à la chute de Ben Ali et ont soutenu les rassemblement de liesse dans les grandes villes de France, n'ont pas eu d'élus pour mettre en garde l'Union européenne contre l'afflux prévisible de clandestins et de demandeurs d'asile politique.

De Bruxelles, quatre semaines plus tard, la Commissaire européenne à la sécurité Cecilia Malmström explique qu'elle« a parlé personnellement samedi [12 février] avec Roberto Maroni, et elle est [maintenant] parfaitement consciente de la pression exceptionnelle sur l'Italie». Elle est aussi en contact avec Frontex, l'agence de l'UE chargée de la surveillance des frontières, et avec le bureau européen d'aide à l'asile, « pour examiner de quelle manière ils pourraient assister les autorités italiennes ». «La Commission est prête à discuter la question plus en détail au prochain Conseil Justice et Affaires intérieures le 24 février», a-t-elle ajouté.
Le chef de la diplomatie de l'Union européenne, la Britannique Catherine Ashton, est attendue lundi en Tunisie, pour une visite centrée sur la volonté de l'UE d'apporter son assistance aux réformes démocratiques dans ce pays après la fuite du président Zine El Abidine Ben Ali.

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