jeudi 27 janvier 2011

CGT: à 52 ans, Thibault fait valoir ses droits à la retraite

A la CGT, aucune envie de séquestrer le patron !

"Bernard Thibault veut jeter l'éponge", selon Le Parisien

Dans son édition du jeudi 27 janvier, le quotidien confirme que le numéro un de la CGT en a ras la casquette du syndicat. Il a été clair avec son entourage, le 21 décembre au soir, lors d'un séminaire très privé avec les membres de l'état major de la centrale syndicale. Il est déterminé à céder son poste à la fin de l'année 2011, alors que son mandat - le troisième - court jusqu'à fin 2012. L'intéressé a vigoureusement démenti l'information dans la journée, dénonçant une tentative de déstabilisation, sans qu'on en sache plus de son origine, extérieure ou interne. Le Parisien affirme même que Thibault avait mis la question de son départ à l'ordre du jour du bureau confédéral de lundi.

Les camarades lui ont-il glissé une savonnette ?

Un non-événement
Le boycott des voeux sociaux de Nicolas Sarkozy a été monté en épingle, mais 'il lui en aura touché une sans bouger l'autre' (Chirac). Ensuite, le refus de rencontrer le nouveau ministre du Travail, Xavier Bertrand, aura allégé son emploi du temps et démontrer l'incapacité de la CGT a dialoguer.

Reste que, depuis le début de l'année, le leader cégétiste s'évanouit dans le paysage médiatique.
L'excuse qu'il se donne, " Je pars à la fin de l'année de manière à ce que mon successeur soit en place avant les présidentielles ", ne satisfait personne. " Personnellement, je suis persuadé que Bernard Thibault cherche vraiment à partir, confie à L'Expansion.com Dominique Andolfatto, professeur en science politique à l'Université de Nancy et co-auteur avec Dominique Labbé du livre "Toujours moins. Déclin du syndicalisme" (Gallimard, 2009). L'info vient sans aucun doute de l'entourage."

Qu'est-ce qui le déprime tant ?


Il a fait le tour de la CGT et du syndicalisme
"Je pense effectivement que Bernard Thibault a épuisé les charmes de la fonction depuis assez longtemps. D'abord, il n'était sans doute pas formaté pour cette fonction. Contrairement à ses prédécesseurs - Séguy, Krasucki ou Viannet -, il n'a pas grandi dans le sérail, explique Dominique Andolfatto. Il n'a pas été longtemps un apparatchik de la CGT et du PC. C'est un peu par hasard qu'il s'est retrouvé à la tête de la CGT, parce que celle-ci traversait une crise grave et que se posait le problème de son leadership. Thibault, qui s'était fortement engagé dans le mouvement social de 1995, est apparu comme une figure incontournable, pour ne pas dire un homme-providentiel pour la CGT à la fin de la décennie 90."

Les difficultés à réformer l'organisation de la CGT

Il a expérimenté la relative impossibilité à faire évoluer le "mammouth" CGT, en tous les cas à le faire évoluer suffisamment vite.
Sans oublier le long conflit sur la réforme des retraites l'an passé, qui s'est soldé par un échec pour la CGT puisqu'elle n'a obtenu aucun résultat, en dépit de la popularité du mouvement.
Alors que les effectifs continuent à reculer, il n'est pas parvenu à surmonter les difficultés à inventer une organisation plus dynamique en termes de syndicalisation. ", énumère Dominique Andolfatto.

On lui savonne la planche en interne

Certains affrontements qui semblent prendre parfois une tournure personnelle, comme avec Didier le Reste de la fédération des cheminots, l'ont épuisé.
Quant il est élu secrétaire général de la CGT en 1999, il procèda en effet à un important aggiornamento du syndicat, privilégiant la négociation à la lutte. " Dès le début, cela a évidemment heurté en interne, commente Dominique Andolfatto. Les "enclumes" ont cherché à résister aux évolutions." Thibault parvint dans un premier temps à convaincre.

Mais les esprits conservateurs se bloquent peu à peu. En 2005, la CGT vit une crise historique: Bernard Thibault, qui défend le "oui" au Traité constitutionnel européen, est mis en minorité par le comité confédéral national - le parlement interne du syndicat. " C'est à partir de ce moment-là que les choses vont se dégrader sérieusement entre Bernard Thibault et une partie des composantes ou sous-leaders de la CGT ", estime Dominique Andolfatto. Le leader cégétiste menaça d'ailleurs déjà de démissionner à cette période.

Depuis deux ans, la base militante l'accuse en outre d'être trop consensuel dans ses relations avec le gouvernement et le patronat.
Le 17 août 2009, le délégué CGT de l'usine Continental de Clairoix, Xavier Mathieu, a suscité la polémique en traitant Bernard Thibault de "racaille" et en l'accusant de "frayer" avec le gouvernement.

On lui reproche aussi le rapprochement avec la CFDT
, symbolisée par la création de l'intersyndicale fin 2008. Bernard Thibault et son homologue de la CFDT François Chérèque ont marché main dans la main durant le conflit sur les retraites. Cette "CFDTisation" de la CGT "est très mal vécue par les bases militantes de la CGT", explique Françoise Piotet, professeur de sociologie à l'Université Paris I Panthéon-Sorbonne, qui a enquêté pendant trois ans auprès des organisations locales et des structures interprofessionnelles cégétistes ("La CGT et la recomposition syndicale", PUF 2009). Pour ces militants cégétistes, l'ennemi numéro un c'est la CFDT, pas FO ou Sud." Néanmoins, "l'opposition à Thibault est moins forte que son soutien, nuance-t-elle. La preuve: il a été réélu pour un troisième mandat en 2009, avec près de 90% des voix."

Qui sont ses héritiers ?

Une femme
La question de la succession n'est pas réglée. Selon Le Parisien, Bernard Thibault souhaiterait que ce soit Nadine Prigent, secrétaire confédérale issue du secteur de la santé, qui lui succède (lien PaSiDupes). "Ce changement serait symbolique de la place désormais acquise par les femmes dans la CGT, longtemps une affaire exclusive d'hommes, souligne le politologue. En termes de transformations et d'avenir de la CGT, cette désignation se justifierait pleinement. Reste à se demander si l'intéressée a la carrure..."

Pour trois hommes
Les autres noms évoqués sont ceux d'Eric Aubain, le monsieur "retraites" de la CGT, issu de la fédération de la construction, de Thierry Le Paon, chargé de négocier sur la formation professionnelle et de Frédéric Imbrecht, ex-secrétaire général de la puissante fédération de l'énergie.

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