jeudi 26 février 2009

12 ans, OK pour les agressions sexuelles, mais prématuré pour la responsabilité pénale

Où en est la réforme de la justice des mineurs?

Félicitations à Alfie Patten, 13 ans, 1,22m et à Chantelle Steadman, 15 ans, qui ont mis au monde leur première petite fille Maisie, née le 9 février dans un hôpital d'Eastbourne au sud de l’Angleterre. C’est trop mignon ! Tellement que le jeune garçon fait des émules. Des petits Français ont sans doute voulu faire leurs preuves à leur tour et connaître la gloire médiatique, mais en se passant de la formalité du consentement libre de leur victime de 13 ans
Côté laïus

«Nous sortons d'une société adulto-centriste et masculine où l'âge adulte servait d'étalon aux autres âges pour entrer dans une société multigénérationnelle», dixit Louis Chauvel, sociologue des comportements.
La baisse de la fécondité et l'allongement de la durée de la vie, conjugués à une entrée dans la vie active de plus en plus tardive, l'alternance de périodes d'activité et de chômage, une sortie précoce de la vie professionnelle et une recomposition des familles ont fait voler en éclats le découpage rassurant des âges. Celui-là même qui a servi de repère aux sociétés occidentales - enfance, adolescence, maturité, vieillesse. Entre des enfants qui n'en sont plus, des jeunes qui s'installent dans l'adolescence, des vieux qui restent jeunes, l'âge de la maturité se retrouve pris en sandwich, et remet en cause son modèle, une famille et un emploi stable. Introuvables, les âges et leurs fonctions démocratique, économique, sociale et culturelle sont à réinventer. Adulte à 12 ans, ado à 30.

Côté sexuellement agressée à13 ans par deux garçons de 11 et 12 ans

Un banal fait divers ?

Deux mineurs de 11 et 12 ans, soupçonnés d'agression sexuelle sur une mineure de 13 ans dans un collège d'Arras, ont été mis en examen la semaine dernière, a-t-on appris mercredi auprès de l'avocat de l'un d'eux. C'est la mère de la victime qui a déposé plainte à la police. Les faits se seraient déroulés au début du mois, dans les toilettes ET dans le centre de documentation de l'établissement (CDI), un lieu d'étude, a précisé Me Etienne Prud'homme.

La panacée : activation d’une cellule psychologique ?
L'académie de Lille a indiqué dans un communiqué qu'une enquête administrative était en cours et que les deux garçons suspectés "feront l'objet de mesures disciplinaires dans les meilleurs délais"."Toutes les mesures conservatoires ont été prises afin qu'à la rentrée (le 9 mars) un accompagnement soit mis en place et que les élèves concernés ne se retrouvent plus dans le même collège", précise le rectorat.

Comment reconstruire sereinement les petits violeurs ?

  • L'académie de Lille a indiqué dans un communiqué qu'une enquête administrative était en cours et que les deux garçons suspectés "feront l'objet de mesures disciplinaires dans les meilleurs délais". Deux heures de travaux d'intérêt général ?
    "Toutes les mesures conservatoires ont été prises afin qu'à la rentrée (le 9 mars) un accompagnement soit mis en place et que les élèves concernés ne se retrouvent plus dans le même collège", précise le rectorat.
  • Le procureur de la République d'Arras, Jean-Pierre Valensi, a simplement confirmé la mise en examen des deux garçons mineurs pour agression sexuelle, au risque de les traumatiser.
    Les deux mineurs ont toutefois été laissés libres de leurs mouvements et remis à leurs parents. "Ils n'encourent que des sanctions éducatives parce que, pénalement, ils ne peuvent pas avoir de peines de prison ou d'amendes", a ajouté l'avocat.
    "Il s'agit de mineurs de moins de 13 ans. Place aux mesures éducatives. Il faut privilégier l'action, en toute sérénité, de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ), des psychologues et des psychiatres", a expliqué le magistrat, qui n'a pas souhaité faire de commentaire sur les faits. En admettant que la psychologie et la psychiatrie soient des sciences "dures" ('scientifiques', stricto sensu), les sexologues ne sont pas conviés : sans doute la sexologie est-elle une science par trop « molle » dans une affaire où toute mollesse est exclue.

    Vers la responsabilité pénale à 30 ans ?

    Lorsqu’en octobre 2008 à l’inauguration d'une nouvelle école nationale de la Protection judiciaire de la jeunesse Roubaix, la garde des Sceaux, Rachida Dati, annonçait son souhait d'instaurer des procédures plus sévères et plus rapides
    , les réactions hostiles fusèrent aussitôt.
    Composée de 32 membres - magistrats, policiers, juristes, éducateurs... -, toutes sensibilités politiques confondues, la commission Varinard, du nom de son président professeur de droit à Lyon, proposa de remettre à plat la justice des mineurs en 70 points.

    La ministre de la Justice privilégiait trois axes
    :
  • Abaisser l'âge minimum de responsabilité pénale à 12 ans. Si cette proposition est adoptée, un enfant pourra donc être poursuivi en justice dès l'âge de 12 ans. "Jusqu'à présent, il revenait au magistrat d'évaluer la capacité de "discernement" du mineur fautif pour savoir s'il relevait de la justice", rappelle Le Figaro.
  • "Permettre au juge de prononcer plus rapidement une sanction contre les jeunes fauteurs de trouble", selon le quotidien.
  • "Rachida Dati veut que la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) se concentre sur les mineurs ayant à faire à la justice pénale et ne consacrent plus temps et moyens à la prise en charge des mineurs en danger, notamment ceux victimes de maltraitance", toujours selon Le Figaro.
    Et « détail » souvent escamoté par la presse partisane, insolente mais objective :
  • Incarcération de mineur de moins de 14 ans interdite, sauf en matière criminelle et dans des conditions précises et dans des structures adaptées.

    En avril dernier, la ministre avait lancé la commission Varinard chargée "de remettre à plat l'ordonnance de 45 qui régit la justice des mineurs, pour plus d'efficacité".Selon le ministère, ce texte, datant de l'après-guerre, "n'est plus adapté aux réalités sociales d'aujourd'hui".
  • L’opposition conservatrice freine des quatre fers

    Le 4 décembre 2008, le Syndicat de la Magistrature qualifiait le projet de « vision réactionnaire et répressive de l’enfance », le jour où la commission rendait son rapport à la ministre de la Justice :
    « Le Syndicat de la magistrature affirme sa volonté de s’opposer fermement aux principales orientations de la commission Varinard qui nous feraient revenir à une époque où les jeunes commettant des actes de délinquance n’étaient appréhendés que sous l’angle du maintien de l’ordre public, au mépris de l’éducation. ». Et des victimes.
    Le SM accuse les membres de la commission :
    « la commission Varinard n’a pas travaillé dans un esprit de véritable concertation mais a surtout souhaité répondre à la commande politique exprimée sans fard par la Garde des Sceaux lors de l’installation de cette commission le 15 avril dernier. »

    Un collectif lui faisait écho et tout le réseau des associations et collectifs prenait possession des moyens institutionnels de diffusion de la propagande. « En prison à 12 ans », résume aussi un site d’enseignants dans un raccourci sans doute pédagogique, mais aussi sensationnel qu’idéologique. Ceux qui ne parviennent pas à prévenir les abus en tous genres et se font eux-mêmes maltraiter, abandonneraient-ils les victimes à leur sort, et les agresseurs à leurs pulsions, au prétexte qu’ils n’ont pas les moyens ? « C’est la faute à la société », affirmait facilement la gauche. « C’est la faute à la politique », prétend-on dans tous les cas aujourd’hui. Sarkozy est rendu responsable. La gauche n'est responsable d'aucun blocage, d'aucun conservatisme, de rien.

    Quand les réformes ne sont pas jugées idéologiquement correctes et conformes à la pensée unique, les crédits ne sont pas insuffisants.

    Toutes les raisons sont bonnes à gauche

  • pour bloquer les réformes :En avril dernier, la ministre avait confié au recteur André Varinard le soin de piloter une commission de 32 membres chargée de remettre à plat l'ordonnance de 45 qui régit la justice des mineurs, pour plus d'efficacité. Ce texte, datant de l'après-guerre, n'est plus adapté aux réalités sociales d'aujourd'hui, estime le ministère. Les crimes sexuels, par exemple, le démontrent trop souvent.

  • pour taire ce qui fait peur :
    Bien qu’ils ne couvrent pas l’ensemble des crimes et délits, dont un grand nombre reste secret, les chiffres montrent pourtant un bilan déjà accablant : en 2006, plus de 57 000 mineurs ont été condamnés par la justice. La délinquance s'est également considérablement durcie et touche des mineurs de plus en plus jeunes - 32 enfants de moins de 13 ans ont été jugés pour des crimes.
  • pour préserver les intérêts catégoriels :

    Les futurs éducateurs craignent pour leurs postes, si les sanctions dites «éducatives», créées par la loi Perben I et peu utilisées par les juges sont abandonnées.
    Pourtant, Rachida Dati voudrait en revanche que la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) se concentre sur les mineurs ayant à faire à la justice pénale et n’aient plus à consacrer autant de temps et de moyens à la prise en charge des mineurs en danger, notamment ceux victimes de maltraitance.
  • pour conserver aux juges souverains leur pouvoir discrétionnaire:
    Jusqu'à présent, il revenait au magistrat d'évaluer librement la capacité de «discernement» du mineur jugé coupable, pour savoir s'il relevait de la justice : le projet envisage une peine automatique.
    Le prétexte de l’opposition pour empêcher la réforme du droit ? Le ministère voudrait voir cet âge minimum fixé à 12 ans alors que certains des membres de la commission plaident pour fixer le seuil à …13 ans.

    Où en est le rapport de la commission Varinard ?
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