dimanche 11 janvier 2009

Cachez ce manuscrit que Jack Lang ne saurait voir

Quand Jack taclait Sa Cynique Majesté Royal
Voici ce que l’Express révélait le 11 février 2007 de ce manuscrit censuré
(Lire aussi PaSiDupes) et que vous ne trouverez pas dans le site cloné à l'infini de la battue et rebattue:

L'Express a pu lire le manuscrit que Lang s'apprêtait à publier en 2006... avant d'en bloquer la sortie. Il n'épargnait pas celle dont il vante désormais sans relâche les qualités

Petite devinette

Qui a écrit, visant Ségolène Royal: «Je n'ai jamais entendu qu'une pensée très ringarde là où on aurait au moins pu espérer un discours à la fois tranché et novateur. Tant qu'à jouer les cavaliers seuls, il serait bienvenu d'avoir des choses intéressantes à dire»? Nicolas Sarkozy? François Bayrou? José Bové? Vous n'y êtes pas: Jack Lang, l'omniprésent «conseiller spécial» de la candidate socialiste.

Ce jugement assassin, prononcé il y a seulement quelques mois, devait figurer dans un livre signé par l'ancien ministre de la Culture et intitulé "Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur moi". La couverture était choisie, les épreuves prêtes, une attachée de presse spécialement recrutée et tous les libraires de France attendaient cet ouvrage au titre accrocheur pour la fin d'août 2006. Coup de théâtre: au tout dernier moment, Jack Lang ordonne à son éditeur, Bernard Pascuito, de ne pas sortir ce livre d'entretiens.

«Trop vulgaire»,
a justifié celui qui, il y a quelques jours, enjoignait aux Français de ne pas se laisser «empapaouter» par Nicolas Sarkozy.Trop vulgaire? L'Express, qui a pu lire le manuscrit de ce livre interdit, n'a pourtant découvert qu'un ouvrage politique de facture très classique et au ton mesuré. La cause véritable du revirement «langien» ne serait-elle pas plutôt à rechercher dans ce chapitre III au titre explosif: «On n'est jamais trahi que par les siens»? Rédigées au printemps 2006, alors que Jack Lang était encore bien décidé à briguer la présidence de la République au nom des socialistes - les deux premiers chapitres étaient d'ailleurs intitulés «Candidat» et «Le meilleur d'entre tous» (sic) - ces pages ne sont en effet pas toujours très câlines pour Ségolène Royal.

La «boum» du PS au Trocadéro


Jack Lang raconte avec délectation dans ce manuscrit comment il a réussi à organiser le grand rassemblement socialiste des élections européennes de 1979, dans les jardins du Trocadéro. Tâche peu aisée, il fallait au préalable obtenir le feu vert de Jacques Chirac, maire de Paris, et de Valéry Giscard d'Estaing, président de la République. Profitant des relations exécrables entre les deux ténors de la droite, Lang fait croire à chacun d'eux que l'autre a déjà donné son accord. Il arrache ainsi l'autorisation.

Et Mitterrand glissa à Defferre…
Le meeting est un grand succès. Une rose et un poing se dessinent au laser dans la nuit de Paris. Lang raconte la suite: «Dans la voiture qui nous emportait, avec Gaston Defferre, alors que la fête s'achevait, Mitterrand s'est tourné vers Defferre: «Dis-moi Gaston, tu aurais laissé le RPR faire une boum sur la Canebière, toi?»

"Je n'ai jamais entendu qu'une pensée très ringarde"

Jack Lang y multiplie les piques: «C'est une chose de distiller quelques petites phrases explosives par-ci par-là. C'en est une autre de proposer de vraies idées de changement lors des réunions du parti.» Ou encore: «On ne construit pas un grand projet d'avenir sur un effet de mode.» Et puis, plus loin, toujours avec cet art consommé de la litote: «D'aucuns lui reprochent de n'avoir pas beaucoup participé aux réunions de travail et de ne pas avoir apporté grand-chose au débat interne.» L'ancien locataire de la Rue de Valois va jusqu'à dénoncer certains «dérapages verbaux» de sa rivale, à propos de sujets aussi importants que la délinquance des mineurs ou les 35 heures. Et ce n'est pas tout. S'estimant «trompé», il met nommément en cause François Hollande: «L'homme qui devait jouer les rassembleurs nous a divisés: c'est pour cela que je parle de manipulation.»

Plus étonnant encore

En marge de la rédaction du livre, Jack Lang avait obtenu une autorisation spéciale, afin d'envoyer un collaborateur de son éditeur aux archives de l'Institut Mémoires de l'édition contemporaine (Imec), à Caen (Calvados), pour y retrouver une correspondance entre Ségolène Royal et lui-même. Ce qui fut fait. Cet échange de courrier un peu vif, qui date de la période où Lang était ministre de l'Education nationale dans le gouvernement Jospin et Royal, sa ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance, portait sur la pédophilie à l'école. «Je considère qu'un enfant dit toujours la vérité», y écrivait Ségolène Royal. Un jugement qui, à la lumière récente de l'affaire d'Outreau, aurait pu se retourner contre la candidate du PS. Il ne figurera finalement pas dans le manuscrit. Au passage, l'émissaire de Lang découvrira dans les archives de l'Imec les centaines de feuillets d'un autre livre d'entretiens, avec l'ancien journaliste du Monde Philippe Boggio, qui, lui aussi, resta inexplicablement dans les cartons...

Un manuscrit pourtant passionnant

«Le texte dont j'ai refusé la publication ne fustigeait en aucun cas Ségolène Royal!», avait juré Jack Lang, en novembre dernier, au Monde, qui avait signalé sa volte-face éditoriale avec Bernard Pascuito. Contacté par L'Express, l'ancien ministre n'a pas souhaité revenir sur cette affaire. Il est vrai que ce Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur moi tombait au pire moment. Lorsqu'il s'attelle à ce livre, au printemps 2006 - il accordera, au total, 27 longs entretiens à Pascuito et au journaliste qui le seconde - Lang est candidat à la candidature socialiste. Le 15 juin, il reçoit les huit premiers chapitres, dont il se déclare satisfait. Il signe d'ailleurs, dix jours plus tard, le contrat d'édition (ses droits d'auteur, soit 5% du prix du livre, devaient être versés à son association, Inventons demain!).
[Une action humanitaire...]

Au cours de l'été

Lang sent-il que sa candidature bat de l'aile et qu'il sera peut-être amené, un jour, à se rallier à Ségolène Royal? Toujours est-il qu'il retarde la sortie du livre au 30 août, puis au 13 septembre, avant, on l'a vu, d'en interdire la publication. Le 2 octobre, il renonce à demander l'investiture socialiste. Le 5 novembre, il annonce, au 20 Heures de TF 1, qu'il soutient Ségolène Royal.

Bernard Pascuito, lui, reste avec son manuscrit sur les bras - il réclame aujourd'hui 125 000 euros à l'ancien ministre devant les tribunaux, pour manque à gagner. Un manuscrit pourtant passionnant, où Jack Lang répondait non sans panache aux rumeurs sur le financement de son appartement parisien de la place des Vosges, sur sa maison dans le Luberon, sur l'homosexualité et même sur la pédophilie. Sur ce dernier point, il révélait qu'il avait la preuve que des rocardiens et des jospinistes avaient lancé une campagne insidieuse sur ce thème contre lui, au début de 1995. Oui, décidément, on n'est jamais trahi que par les siens.

Ca déchire !

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