jeudi 24 mai 2007

Le Monde a banni Colombani

Colombani désavoué doit partir
La rédaction du Monde s'est opposée mardi à la candidature de Jean-Marie Colombani à la présidence du directoire du groupe, lors d'un vote à bulletins secrets, a annoncé le président de la société des rédacteurs du Monde (SRM), Jean-Michel Dumay.
La rédaction du Monde, qui possède un droit de veto sur la nomination du président du directoire, s'est prononcé mardi sur la candidature de Jean-Marie Colombani, seul candidat à sa succession à la tête du groupe.
Jean-Marie Colombani cumulait depuis 13 ans les fonctions de président du directoire du groupe et de directeur de la publication du quotidien, et briguait un nouveau mandat de six ans. De quoi faire rêver les candidats à la législative et à la présidence de la République. Les cumulards de la politique en sont même venus à culpabiliser! Car dans la presse, on vilipende le cumul des mandats, on tient des discours sur l'éthique, mais on dit aussi aux autres: "Faites ce que je dis, pas ce que je fais!" Les privilèges de la presse interpellent-ils La République des Idées?
Pour être élu, il devait réunir sur son nom le vote de 16 des 20 membres du conseil de surveillance. En outre, ces 16 votes doivent comprendre les deux voix des deux représentants de la Société des rédacteurs du Monde au conseil de surveillance.
Le conseil de surveillance est composé de
- 10 membres représentant "les partenaires extérieurs", dont par exemple Jean-Louis Beffa (Saint-Gobain), Pierre Lescure, Etienne Pflimlin (Crédit Mutuel), Claude Perdriel (Nouvel Observateur actionnaire du Monde) et la société de lecteurs du Monde.
Lors d'un premier tour de table organisé début avril, ces partenaires se sont déjà prononcés "à une nette majorité" en faveur du renouvellement de M. Colombani.
- les 10 autres membres du conseil de surveillance représentent les "actionnaires internes" du Monde: la société des rédacteurs du Monde (SRM), celle des cadres et celle des employés, la société du personnel des Publications de la Vie Catholique (Télérama, La Vie...), les journalistes du Midi Libre...
Toutes ces sociétés ont organisé des assemblées générales pour voter sur la candidature de J.-M.. Colombani avant le conseil de surveillance qui devait procèder au renouvellement du directoire.
L'avis de la société des rédacteurs du Monde (SRM) revêt une importance particulière car les journalistes détiennent un droit de veto sur la nomination du patron du groupe. Autre spécificité, pour remporter les suffrages de la SRM, le candidat doit réunir au minimum 60% des voix.

Depuis quelques mois, Jean-Marie Colombani s'est donc lancé dans une intense campagne interne. Début mars, il a réuni l'ensemble des salariés du Monde dans un grand hôtel parisien pour réaffirmer sa stratégie consistant à faire du Monde un véritable groupe de presse, regroupant quotidiens nationaux et régionaux, journaux gratuits, magazines, sites internet... Il a notamment évoqué sa volonté d'engager une réflexion sur un quotidien bon marché du matin, pour faire face au projet de l'Allemand Axel Springer, qui veut se lancer sur ce créneau en France.

J.-M. Colombani, qui incarnait l'image du Monde depuis 13 ans, se présentait également comme le garant de son identité et de son indépendance. "Ce que je souhaite, c'est ne pas être le dernier journaliste à la tête de ce groupe. Et pour pouvoir ne pas être le dernier et pour pouvoir transmettre le relais, tout le monde s'accorde à dire qu'il faut que je prolonge et que j'accomplisse un nouveau mandat", a-t-il récemment déclaré sur LCI. Le chantage n'a pas marché.
Mais une partie de la rédaction s'inquiète des conséquences financières de la politique de diversification de J.-M. Colombani, alors que le Monde a accusé en 2006 une perte de 14,3 millions d'euros, réduite de moitié par rapport en 2005.
Pour la première fois de son histoire, la SRM s'est opposée en septembre à la stratégie du président en votant contre le projet de rapprochement des quotidiens régionaux du Monde avec ceux du groupe Lagardère.
Certains critiquent également la concentration des pouvoirs dans les mains de J.-M. Colombani
Un projet, issu des chantiers engagés par la SRM, prévoit notamment un élargissement du directoire et une dissociation des fonctions de président du directoire et de directeur de la publication.

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