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mercredi 26 mars 2008

La magistrature visiblement politisée

Les élèves magistrats manifestent maintenant dès l’école
L’Ecole Nationale de la Magistrature (ENM) était pour la première fois le théâtre d’une manifestation hier mardi 25 mars à Bordeaux. Des élèves magistrats, appelés des "auditeurs de justice", ont protesté contre une réforme de leur formation.
Cette réforme est pourtant réclamée depuis de longues années par la profession autant que par les justiciables. Il est clair que des considérations politiques d’opposition animent cette manifestation. Elle se déroulait à l’école même, puisque c’est logiquement à Jean-François Thony, son directeur, un professionnel de la magistrature et de la pédagogie, que la Garde des Sceaux, Rachida Dati, a confié la charge de cette réforme, plutôt qu’à un politique, pourtant.

Premier sujet de satisfaction de nature à rasséréner les justiciables, ce projet mûri depuis 2006 prévoit de généraliser le contrôle des compétences de tous les magistrats avant leur nomination dans leurs premières fonctions. Il est la suite du rapport de la commission d'enquête parlementaire sur le fiasco judiciaire dans l'affaire de pédophilie d'Outreau. Cette commission était alors présidée par André Vallini, un magistrat, secrétaire national à la Justice du PS.
Le 9 juin, à la barre pendant près de six heures, le juge Fabrice Burgaud qui avait instruit l’affaire s'est retrouvé en position d'accusé. «Vous êtes naïf et bardé de certitudes», «aveugle face aux invraisemblances de l'affaire», ont asséné les avocats de la défense. Deux des femmes mises en cause l'ont traité de «menteur». Hermétique face à ce tir de barrage, le jeune magistrat s'est contenté d'exposer sa «méthodologie», permettant de «faire le tri» entre les différentes accusations. «C'est une mission technique», a-t-il répété inlassablement. Et froidement.
Fabrice Burgaud, tout frais émoulu de l'Ecole de la magistrature (ENM), avait 30 ans quand il fut nommé à Boulogne-sur-Mer. Le cloaque d'Outreau, sur lequel planait l'ombre de l'affaire Dutroux, était son premier dossier. Ce cas exceptionnel raviva, jusqu'à l'absurde, une question cruciale: peut-on laisser un magistrat - a fortiori sans expérience - assumer seul l'instruction d'affaires aussi complexes?

Rachida Dati, la Ministre de la Justice, a donc présenté le 22 février ce projet en vingt et un points parmi lesquels figure l'introduction attendue de tests psychologiques lors de l'admission à l’Ecole. Cette disposition était apparue nécessaire en réponse à la fragilité du juge Fabrice Burgaud qui à 32 ans, avait instruit seul l'affaire de pédophilie d'Outreau, de février 2001 à juin 2002, au point de devenir le symbole de la retentissante faillite judiciaire. On lui reproche d'avoir mis en examen, malgré l'absence de preuves matérielles et l'inflation délirante des accusations, 17 personnes dont certaines, à la lumière du procès en cours, n'auraient probablement jamais dû se retrouver devant la cour d'assises de Saint-Omer.
Bénéficiaire d’une rémunération de 1 600 euros nets par mois à bac +4, cette jeunesse étudiante est aussi bourgeoise et conservatrice que politisée. Malgré ce précédent notoire et la pression de l’opinion qui réclame une justice plus sereine, les futurs magistrats ont défilé durant une heure entre l'ENM, la Cour d'Appel et … la mairie de Bordeaux derrière des banderoles sur lesquelles on pouvait lire "Réforme de l'ENM, magistrats mal formés : le justiciable en fait les frais". Le justiciable est-il vraiment l'objet de leur souci? Et pourquoi la mairie de Bordeaux, si ce n’est pour des raisons politiques de manipulation : le trajet de l’ENM à la Cour d'Appel n’aurait-il pu suffire ?
Hélène Acquier, auditeur de justice de la promotion 2006 (15° sur 34), , et déléguée de la section du Syndicat de la magistrature (SM), prétend qu’ils étaient deux cents à manifester et cent cinq à s'être déclarés grévistes… Cette déclaration est sujette à caution au vu de la photo ci-dessous, même en incluant l'encadrement de professeurs...
Le projet de réforme prévoit également une réduction de 30 à 26 semaines de la formation initiale (7 mois effectifs en école et hors stages) et la réduction de un an à six mois du premier stage dans un tribunal (quelques semaines dans chacune des six fonctions de la juridiction -siège, parquet, instance, instruction, enfants, application des peines- sur les 14 mois qu'effectuent les auditeurs de justice au sein d'un tribunal. Ces derniers passent environ 6 semaines.). La formation actuelle fait déjà alterner périodes d'enseignement à Bordeaux et périodes de stage en juridiction. En fin de cursus, les auditeurs rejoignent un cabinet d'avocat pour un stage de deux mois. Au cours de cette période, ils peuvent plaider devant l'ensemble des juridictions civiles, pénales et administratives du fond, sous le contrôle de l'avocat ou en se substituant à celui-ci. Une fois le premier poste choisi, chaque auditeur de justice suit une formation pratique de cinq mois exclusivement consacrée à la fonction qu’il exercera à la sortie de l’ENM.
En fonction de leurs résultats à l'examen de classement et d'aptitude, les auditeurs de justice choisissent leur premier poste de magistrat, sur la liste proposée par le ministère de la Justice. Une période de spécialisation de 6 mois leur permet de recevoir une formation complémentaire pour se préparer aux mieux à l'exercice de la première fonction. De stage de six mois en stage de six mois, il est facile d’entretenir la confusion.

La réforme consiste en fait essentiellement à inverser les périodes en faveur d’une spécialisation renforcée plus longue. Si rien ne bouge, combien de procès d’Outreau encore et de juges Burgaud ?
L’étudiante Hélène Acquier s’est exprimée aussi contre une réforme "qui remet en cause des principes d'enseignement qui [leur] semblent indispensables à la formation des futurs magistrats". Faire une fixation sur l’enseignement théorique est donc un comportement douteux après une maîtrise de droit. Elle lui reproche une spécialisation précoce qui limiterait les possibilités de navigation dans la profession. Elle s'élève notamment contre "le raccourcissement de la période de formation généraliste". Cette déléguée syndicale qui souhaite actuellement devenir juge des enfants voudrait se réserver la possibilité un beau jour de passer juge d’application des peines ou procureur et donc être polyvalente.
Or, pour être plus vrai(e) et ne pas tomber dans la manipulation de l’opinion, cette militante aurait dû ajouter que la spécialisation intervient en revanche plus tôt et que la durée des études reste inchangée au final ! Cette future magistrate est prometteuse d’équité et de justice…

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